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Guerre en Ukraine : la menace russe s’éloigne de Kharkiv, la deuxième ville du pays

Selon le président ukrainien, les troupes russes sont repoussées de la ville de Kharkiv, mais l’intensité des bombardements a, elle, augmenté, d’après le gouverneur de la région.

Les combats se poursuivent entre forces ukrainiennes et forces russes et pro-russes dans l’est et le sud du pays. Mais selon le président Volodymyr Zelensky, l’étau se desserre autour de la ville de Kharkiv. Ce recul des troupes russes s’accompagne de lourds bombardements sur la ville. Les frappes aériennes se poursuivent également dans d’autres régions, à Odessa ou Marioupol.

Côté diplomatique, Kiev réclame son adhésion à l’Union européenne – une « question de guerre ou de paix » – tandis que les pays membres, eux, seraient proches de trouver un accord autour d’un embargo sur le pétrole russe. Il pourrait être annoncé dans la semaine, selon le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune.

  • La menace russe s’éloigne de Kharkiv

L’étau russe se desserre sur Kharkiv, la deuxième ville d’Ukraine et pilonnée depuis fin février, ont affirmé les autorités ukrainiennes la nuit dernière. « Nos forces armées nous ont donnés à tous de bonnes nouvelles de la région de Kharkiv. Les occupants sont progressivement repoussés », a dit le président Volodymyr Zelensky dans une vidéo. « Je suis reconnaissant à tous nos combattants qui tiennent bon et font preuve d’une force surhumaine pour chasser l’armée d’envahisseurs. »

« Les localités de Cherkasy Tychky, Rusky Tychky, Roubijné et Bayrak ont été libérées », a précisé l’état-major ukrainien sur Facebook. « Ainsi, l’ennemi a été repoussé encore plus loin de Kharkiv, et les occupants ont eu encore moins de possibilités de frapper le centre régional. »

Mais « l’intensité des bombardements dans le district de Kharkiv a augmenté », a-t-il aussi relevé. De plus, selon Oleg Snegoubov, chef de l’administration régionale de Kharkiv, « en se retirant, les occupants russes laissent derrière eux des pièges mortels », des mines.

  • Enveloppe américaine de 40 milliards de dollars pour l’Ukraine

La Chambre américaine des représentants a adopté mardi une enveloppe faramineuse de près de 40 milliards de dollars pour la crise ukrainienne, suivant Joe Biden dans son soutien indéfectible à Kiev. Le texte voté par des élus des deux camps dans la soirée comprend un volet économique et humanitaire, mais aussi des armes et des munitions. Il doit désormais être voté au Sénat avant d’être promulgué par le président américain.

  • Vers l’extension du conflit ?

Le renseignement américain prévoit une extension du conflit au-delà de l’Ukraine, estimant que le président russe veut le porter en Moldavie. « Poutine se prépare à un conflit prolongé en Ukraine, durant lequel il a encore l’intention d’atteindre des objectifs au-delà du Donbass » (est). Il viserait aussi la Transdniestrie, région de Moldavie qui a fait sécession en 1990, a déclaré la cheffe du renseignement américain, Avril Haines.

S’il est « possible » que les Russes réalisent cet objectif dans les mois qui viennent, « ils ne pourront atteindre la Transdniestrie et inclure Odessa (sud de l’Ukraine) sans décréter une forme de mobilisation générale », a ajouté Mme Haines lors d’une audition au Congrès américain.

Le président russe « compte probablement sur un affaiblissement de la détermination » des Occidentaux, a-t-elle prévenu. Estimant que les ambitions de Poutine dépassent les capacités de son armée, elle juge « probable » une « trajectoire plus imprévisible et potentiellement une escalade » dans les prochains mois, ainsi qu’une plus grande probabilité de « mesures plus drastiques, y compris l’instauration de la loi martiale, la réorientation de la production industrielle ». « Nous continuons de penser que le président Poutine n’ordonnera l’usage de l’arme nucléaire que s’il perçoit une menace existentielle pour l’Etat ou le régime russe », a-t-elle noté.

  • Kiev insiste pour intégrer l’UE

Kiev a de nouveau insisté sur la nécessité pour sa sécurité d’adhérer à l’Union européenne. Cette adhésion, dans le contexte de l’invasion du pays par la Russie, est devenue une « question de guerre ou de paix », a estimé le même jour le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba. Selon lui, « l’une des raisons pour lesquelles la guerre a commencé est que Poutine était convaincu que l’Europe n’avait pas besoin de l’Ukraine ».

Le président français Emmanuel Macron, qui exerce la présidence tournante de l’UE, avait douché lundi les espoirs d’une adhésion rapide de l’Ukraine à l’UE, affirmant que cette éventualité prendrait « des décennies ». Il a proposé, en attendant, l’accession à un nouvel ensemble, une « communauté politique européenne », susceptible d’accueillir d’autres pays.

  • Ambassades de retour à Kiev

La ministre allemande des Affaires étrangères a annoncé mardi la réouverture de l’ambassade d’Allemagne à Kiev, fermée peu après le début de l’invasion russe, le 24 février. Sa visite a été l’occasion pour Kiev de saluer le « changement de position » de Berlin vis-à-vis de Moscou ces dernières semaines. « Je voudrais remercier l’Allemagne d’avoir modifié sa position sur un certain nombre de questions », dont sa « politique traditionnelle envers la Russie », a déclaré Dmytro Kouleba, son homologue ukrainien.

La ministre allemande s’est rendue à Boutcha, près de Kiev, où des centaines de civils tués ont été découverts après l’occupation russe au mois de mars. « Nous devons aux victimes non seulement de commémorer ici, mais de traduire en justice les coupables (…) c’est la promesse que nous pouvons et devons faire ici à Boutcha », a-t-elle déclaré.

Le ministre néerlandais Wopke Hoekstra, également en Ukraine mardi, a tweeté des photos d’Irpin, autre localité proche de Kiev où l’Ukraine accuse les Russes d’avoir massacré des civils en mars. Lui aussi a annoncé la réouverture de son ambassade dans la capitale ukrainienne.

  • Poursuite des frappes

Sur le terrain, après des frappes sur Odessa (sud), lundi, qui ont fait au moins un mort et cinq blessés, l’état-major ukrainien a annoncé que les tirs d’artillerie et les frappes aériennes russes se poursuivaient mardi dans l’est du pays et sur l’aciérie d’Azovstal à Marioupol (sud-est).

Selon une haute responsable du gouvernement ukrainienne, « plus d’un millier de militaires », dont « des centaines de blessés », se trouvent toujours dans les galeries souterraines de l’immense aciérie, dernière poche de résistance ukrainienne de ce port stratégique du sud du Donbass. Dans le reste de cette région, les Russes « continuent de préparer des opérations offensives dans les régions de Lyman et Severodonetsk », selon l’état-major ukrainien.

Dans la région de Kharkiv, les corps de 44 civils ont été retrouvés dans les décombres d’un immeuble détruit en mars à Izioum, ville sous contrôle russe, selon le gouverneur régional, Oleg Sinegooubov. Dans la région de Donetsk, trois civils ont été tués et trois blessés mardi à Marinka, Avdiivka et Kalynove, d’après le gouverneur régional.

Le ministère russe de la Défense a, lui, annoncé la prise de Popasna, entre Kramatorsk et Lougansk, dans le nord du Donbass, permettant aux forces russes et prorusses d’atteindre « la frontière administrative de la République populaire de Lougansk », soit la « frontière » entre la république de Lougansk, autoproclamée par des séparatistes prorusses, et l’autre territoire séparatiste prorusse, la république autoproclamée de Donetsk.

  • Bientôt un accord des 27 sur le pétrole ?

Les négociations se poursuivent sur le projet d’embargo de l’Union européenne sur le pétrole russe, actuellement bloqué par la Hongrie. Un accord est possible « dans la semaine », a assuré, mardi, le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune. « Les hydrocarbures russes ne sont pas une simple marchandise. Cela vaut la peine d’y renoncer, avant tout au pétrole. Car la liberté est en jeu. Et la protection de la liberté a un prix », a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Le Premier ministre italien Mario Draghi, dont le pays est très dépendant au gaz russe mais livre des armes à l’Ukraine, a rencontré mardi Joe Biden à la Maison Blanche. Le premier a appelé de ses voeux « une Union européenne forte (…) dans l’intérêt des Etats-Unis », le second louant « un bon ami et un grand allié ».