En Allemagne, les grèves se multiplient pour la hausse des salaires
La France n’est pas le seul pays à connaître une forte période de manifestations. Outre-Rhin, les syndicats luttent pour des hausses de salaire face à l’inflation.
Les Français ne sont pas les seuls à descendre dans la rue ces jours-ci pour manifester contre la réforme des retraites. La paix sociale est loin de régner en Allemagne. Depuis des semaines, des appels à la grève largement suivis perturbent sporadiquement le pays. Des millions de salariés des services publics exigent des hausses de salaire substantielles pour faire face à une inflation estimée à 8,1 % au mois de janvier.
Le syndicat Verdi, qui représente 2,5 millions d’agents des services publics fédéraux et municipaux, demande une hausse de 10,5 % des salaires, soit 500 euros brut supplémentaires par mois. Une revendication jugée inacceptable par les communes. Des grèves massives sont possibles.
À la Deutsche Post, négociations au point mort
Les facteurs et les livreurs de paquets ont déjà participé, à plusieurs reprises, à des grèves d’avertissement. Résultat : un paquet sur cinq arrive en retard et les boîtes aux lettres sont le plus souvent vides le matin. Verdi, le puissant syndicat qui les représente, exige une hausse de salaire de 10,5 % pour les 160 000 employés de la Deutsche Post, soit au minimum 500 euros brut par mois.
À la Deutsche Post, les conventions salariales précédentes sont arrivées à échéance à la fin de l’année dernière. Les nouvelles négociations sont au point mort. On en est au troisième tour de table, sans résultat. C’est après-demain, le 8 mars, que les salariés de la poste voteront pour ou contre le déclenchement d’une grève illimitée qui paralyserait définitivement le trafic postal dans toute l’Allemagne.
À la Deutsche Bahn (la SNCF allemande), les grèves ponctuelles d’avertissement vont se poursuivre à l’appel du syndicat des cheminots EVG, qui représente 180 000 salariés. Au bout de deux heures de pourparlers, le ton est monté et les négociations ont dû être interrompues. EVG réclame au moins 650 euros de hausse de salaire par mois. Les Allemands redoutent le chaos pour les vacances de Pâques.
Dans les aéroports, des centaines de vols ont été annulés ces derniers jours à Düsseldorf et à Bonn/Cologne, deux importantes plaques tournantes. Verdi entend là aussi faire monter la pression. Pour le moment le syndicat juge inacceptable la proposition des pouvoirs publics, qui gèrent en partie les aéroports. La situation est bloquée.
Parmi les employés communaux, six régions ont été paralysées vendredi dernier par une grève des transports en commun. Cette semaine, ce sont les Kitas, les jardins d’enfants, qui vont fermer leurs portes. À Berlin, les éboueurs ont fait grève à plusieurs reprises. Les ordures, qui ne sont pas collectées tous les jours, débordent sur les trottoirs. La Charité, Vivantes et l’hôpital juif de Berlin gèrent à eux seuls 10 000 des 22 500 lits d’hôpitaux de la capitale. En raison des grèves et de l’absence du personnel gréviste, les opérations non urgentes ont été reportées.
« Une gifle au visage des employés »
Les premières négociations avec la fédération des employeurs municipaux et le ministère de l’intérieur n’ont pas abouti. La proposition d’une hausse de 3 % au 1er octobre 2023 et de 2 % supplémentaires au 1er juin 2024 ne satisfait pas les représentants syndicaux. « C’est une gifle au visage des employés », commente Verdi. Le prochain round de négociations doit avoir lieu fin mars. Nancy Fraeser, ministre sociale-démocrate de l’intérieur, a rappelé la situation budgétaire difficile dans laquelle se trouvent les communes allemandes.
Pour le moment, il ne s’agit que de grèves d’avertissement ponctuelles et régionales. Mais le chef du syndicat Verdi, Frank Wernecke, a menacé de serrer la vis si la situation n’évolue pas d’ici la fin du mois de mars, date à laquelle a lieu le prochain tour des négociations. Si aucun accord n’est trouvé, une procédure d’arbitrage sera mise en place. Elle pourrait déboucher sur de vraies grèves illimitées dans l’ensemble du pays et sur un printemps très chaud.