Techonologie

Meta profite largement des publicités frauduleuses diffusées sur ses réseaux sociaux

L’agence de presse britannique a eu accès à des documents internes de la société-mère de Facebook, Instagram et WhatsApp qui montrent qu’elle est consciente de la recrudescence de campagnes publicitaires frauduleuses sur ses plateformes. Et qu’elle en tire beaucoup de revenus, bien qu’elle dise vouloir endiguer le phénomène.

C’est un chiffre que Meta s’est bien gardé de diffuser. Selon ses propres prévisions, environ 10% du chiffre d’affaires de la société-mère de Facebook, Instagram et WhatsApp provenait en 2024 de la diffusion sur ces réseaux sociaux de publicités pour des escroqueries et des produits interdits. Soit 16 milliards de dollars, comme l’a révélé une vaste enquête de l’agence de presse britannique Reuters, publiée jeudi 6 novembre et basée sur des documents internes de l’entreprise de Mark Zuckerberg.

15 milliards d’annonces frauduleuses montrées par jour

De 2021 à 2025, de nombreuses alertes sont données concernant la recrudescence de publicités frauduleuses. Selon un document de décembre dernier, Meta reconnaît montrer chaque jour à ses utilisateurs environ 15 milliards d’annonces « à haut risque », c’est-à-dire présentant des signes évidents de fraude. En parallèle, ces internautes sont exposés quotidiennement à quelque 22 milliards de tentatives d’escroquerie organiques, d’après une présentation effectuée en interne à la même date.

Pire, les utilisateurs qui cliquent sur des publicités frauduleuses sont susceptibles de s’en voir proposer davantage, à cause du système de recommandation personnalisée des contenus publicitaires. Les produits ou faux produits mis en avant via ces campagnes sponsorisées varient : des escroqueries dans le domaine de l’e-commerce, des arnaques à l’investissement, des casinos en ligne illégaux, de produits médicaux interdits, etc.

Lutter contre les arnarques, mais pas trop

Pourquoi le géant des réseaux sociaux peine-t-il autant à endiguer ce phénomène qui met en danger sa base d’utilisateurs et lui donne une mauvaise image auprès des annonceurs qui souhaitent, eux, œuvrer dans la légalité ? D’après l’enquête de Reuters, les réponses sont multiples. D’abord, Meta ne bannit des annonceurs que si ses systèmes automatisés prédisent avec une certitude d’au moins 95% qu’ils ont commis une fraude. Sinon, l’entreprise leur impose simplement des tarifs plus élevés.

La société-mère de Facebook et Instagram profite en effet de ces publicités frauduleuses, qui sont achetées grâce à un système d’enchères. Connaissant leur contribution à ses résultats financiers, elle a d’ailleurs imposé des restrictions sur le montant des revenus qu’elle était prête à perdre en prenant des mesures contre les annonceurs suspects, d’après des documents. Ainsi, au premier semestre 2025, l’équipe chargée de contrôler les annonceurs douteux n’était pas autorisée à prendre des mesures qui auraient pu coûter à Meta plus de 0,15 % de son chiffre d’affaires total.

Meta dénonce « une vision sélective » de son approche

Des vagues de licenciements ont également détérioré, à certains moments, la vigilance en la matière de Meta. Un document du premier semestre de 2023 indique par exemple que toutes les personnes qui travaillaient alors au sein de l’équipe chargée de traiter les préoccupations des annonceurs concernant les droits des marques avaient été licenciées. Depuis, l’entreprise affiche « des objectifs ambitieux pour réduire les escroqueries publicitaires en 2025 », de près de 50% sur certains marchés. Le pourcentage des revenus attribuables à ces dernières devrait être ramené à 7,3% pour la fin 2025, à 6% pour la fin 2026, puis à 5,8% en 2027.

Interrogé par Reuters sur les informations révélées par ces documents internes, un porte-parole de Meta a assuré que ces derniers présentaient « une vision sélective qui déforme l’approche de Meta en matière de fraude et d’escroquerie ». Selon lui, l’estimation selon laquelle environ 10% du chiffre d’affaires de l’entreprise en 2024 provenait de ces publicités frauduleuses était exagérée, puisqu’elle incluait dans le lot « de nombreuses » publicités légitimes, a-t-il promis, sans toutefois donner de meilleurs chiffres.

Source : usine-digitale.fr