Techonologie

En grande difficulté, X porte plainte contre les annonceurs ayant osé retirer leurs pubs du site

Elon Musk, le propriétaire de X (ex-Twitter), cherche à convaincre la justice que les entreprises ayant décidé de ne plus y afficher de publicités sont coupables de pratiques anticoncurrentielles. En effet, depuis le rachat du réseau social par le milliardaire, de nombreux annonceurs ont mis fin à leurs campagnes sur la plateforme, préoccupés notamment par le manque de modération et la multiplication des discours de haine. Les dérapages en cascade et théories complotistes relayées par Elon Musk n’ont rien arrangé.

“Nous avons été gentils pendant deux ans et n’avons obtenu que des paroles en l’air. Maintenant, c’est la guerre” : dans un message cinglant publié le 6 août sur son réseau X (ex-Twitter), Elon Musk dénonce les pratiques des annonceurs présents sur sa plateforme. Il leur reproche d’avoir déserté illégalement le réseau social depuis son rachat en octobre 2022. Bien qu’il se décrive à tout bout de champ comme un chantre de la liberté d’expression, Musk semble en effet penser que ces entreprises se doivent d’être ses clients.

Les annonceurs accusés de priver X de « milliards de dollars de recettes »

X a porté plainte devant un tribunal fédéral du Texas contre la Fédération mondiale des annonceurs (WFA) ainsi que plusieurs entreprises dont la multinationale anglo-néerlandaise Unilever, le géant américain de l’agroalimentaire Mars, la chaîne de pharmacies CVS Health et Ørsted, l’une des principales entreprises danoises de l’énergie.

Dans la plainte déposée par X, la WFA est accusée, via son initiative Global Alliance for Responsible Media (GARM), d’avoir usé de pratiques antitrust pour “collectivement priver de milliards de dollars de recettes publicitaires” le réseau social. Il demande des dommages et intérêts d’un montant non-spécifié.

Cette initiative GARM a été créée en 2019 par la WFA pour aider le secteur publicitaire à agir face aux contenus illégaux ou offensants sur les réseaux sociaux. Dans sa plainte, X (ex-Twitter) assure qu’il a appliqué des normes de sécurité comparables à celles de ses concurrents, qui respectent ou dépassent les directives fixées par la GARM.

Insultes, dérapages à répétition, désinformation et théories du complot

Pourtant, depuis le rachat de la plateforme par Elon Musk, les digues de modération semblent avoir cédé. Les discours haineux se sont multipliés, sans blocage, et des milliers de comptes bannis sont réapparus. Si les grands annonceurs ont pour beaucoup quitté la plateforme, c’est donc tout simplement parce qu’ils craignaient de voir leurs publicités côtoyer des contenus problématiques ou offensants.

En janvier, eSafety, régulateur australien de la sécurité en ligne, a d’ailleurs révélé que X (ex-Twitter) avait licencié plus de 1200 employés… chargés de la lutte contre les contenus abusifs. Twitter était déjà un mauvais élève en la matière avant le rachat, et cette élimination pure et simple des équipes n’a évidemment rien arrangé. La Commission européenne a ouvert en fin d’année dernière une enquête contre le réseau social pour violation du DSA, en particulier sur ses actions de lutte contre les contenus illégaux et la désinformation.

Elon Musk avait provoqué le départ d’autres annonceurs en novembre, après avoir apporté son soutien à une théorie du complot antisémite sur son réseau social. Le milliardaire s’était excusé, mais avait tenu un tout autre discours vis-à-vis des annonceurs ayant suspendu leurs publicités : il les avait accusés de lui “faire du chantage”, avant de leur déclarer lors d’une conférence filmée “Allez-vous faire foutre. Est-ce que c’est clair ?”.

Une santé financière inquiétante

L’action en justice serait-elle un moyen pour le milliardaire américain de sauver les finances de sa plateforme ? Au deuxième trimestre, le réseau social a réalisé un chiffre d’affaires de 114 millions de dollars (104 millions d’euros), en baisse de 25% par rapport au premier semestre et de 53% par rapport au deuxième trimestre 2023. Le gestionnaire de fonds Fidelity, qui avait injecté 19,2 millions de dollars dans Twitter au moment du rachat, a dévalué son investissement de 71,5%.

Musk comptait à l’origine sur une stratégie d’abonnement payant pour s’émanciper des annonceurs en changeant de business model. Il a pour ce faire détruit le système de vérification de comptes existant pour le remplacer par des comptes payants disposant de plus de visibilité et de fonctionnalités supplémentaires. Cela s’est traduit par une explosion du spam automatisé (que Musk avait pourtant promis de faire disparaître) et de campagnes de désinformation, mais sans générer beaucoup de revenus au final, la majorité des utilisateurs continuant d’utiliser le site gratuitement.

Elon Musk envisage désormais de rendre la plateforme payante pour tous les utilisateurs, sur la base d’un abonnement annuel d’un dollar par an. Cette formule est actuellement expérimentée en Nouvelle-Zélande et aux Philippines.

Source : usine-digitale.fr