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Brésil : une vaste opération policière antidrogue dans deux favelas de Rio fait au moins 64 morts

L’opération de police a été l’une des plus violentes de l’histoire récente du Brésil, et les organisations de défense des droits de l’homme ont demandé que des enquêtes soient menées.

Les favelas de Complexo do Alemão et Penha, au nord de Rio de Janeiro, ont été le théâtre, ce mardi 28 octobre, de véritables scènes de guerre. Une vaste opération policière menée contre un gang de narcotrafiquants a donné lieu à d’importantes fusillades, ayant fait au moins 64 morts, dont quatre agents, ont indiqué les autorités.

Ces raids, parmi les plus violents de l’histoire récente du pays, ont mobilisé 2 500 policiers et soldats, des hélicoptères et de nombreux véhicules blindés et visaient le célèbre Comando Vermelho (Commandement rouge), gang qui se consacre principalement au trafic d’armes et de drogue.

Au moins 81 suspects ont été arrêtés et un nombre indéterminé de personnes ont été blessées, parmi lesquelles des policiers, des trafiquants présumés et de simples habitants.

Dans une vidéo postée sur X, le gouverneur de l’État, Cláudio Castro, s’est félicité de ce qu’il a qualifié « de la plus grande opération de ce type dans l’histoire de la ville ». Il a indiqué que 93 fusils d’assaut et que plus d’une demi-tonne de drogue ont été saisis. Il a précisé que les personnes tuées « ont résisté à l’action de la police ».

Sur ce même réseau social, la police de Rio de Janeiro a indiqué que « les attaques lâches des criminels contre nos agents ne resteront pas impunies ». Elle a précisé que cette opération faisait suite à une année d’enquête sur le groupe criminel.

Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montraient des flammes et de la fumée s’élevant des deux favelas tandis que des coups de feu retentissaient. Le département de l’éducation de la ville a annoncé la fermeture de 46 écoles dans les deux quartiers concernés, tandis que l’Université fédérale de Rio de Janeiro a annulé les cours du soir et demandé aux personnes présentes sur le campus de se mettre à l’abri.

En réponse à l’opération policière, des membres présumés de gangs ont bloqué des routes dans le nord et le sud-est de Rio, ont rapporté les médias locaux. Au moins 70 bus ont été réquisitionnés pour servir de barricades, causant d’importants dégâts, a indiqué l’organisation des transports urbains Rio Ônibus.

Quel était l’objet du raid ?

Émergeant des prisons de Rio, le gang Comando Vermelho a étendu son contrôle dans les favelas ces dernières années et est accusé de trafic de drogues dures.

Si cette opération de police était similaire aux précédentes, son ampleur est inédite, a déclaré Luis Flavio Sapori, sociologue et expert en sécurité publique à l’université catholique pontificale de Minas Gerais. « Ce qui est différent dans l’opération d’aujourd’hui, c’est l’ampleur du nombre de victimes. C’est un bilan comparable à celui d’une guerre », a-t-il déclaré.

Cependant, il a estimé que ce type d’opération est inefficace, car elle ne vise généralement pas les cerveaux des organisations, mais des subalternes facilement remplaçables. « Il ne suffit pas d’entrer, d’échanger des tirs et de repartir. Il y a un manque de stratégie dans la politique de sécurité publique de Rio de Janeiro », a affirmé Luis Flavio Sapori. « Certains membres de rang inférieur sont tués, mais ils sont rapidement remplacés par d’autres. »

Une opération grandement critiquée

Ces raids ont choqué jusqu’au haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, qui s’est dit « horrifié », a réclamé des enquêtes efficaces et a rappelé aux autorités leurs obligations en vertu du droit international des droits humains.

César Muñoz, directeur de Human Rights Watch au Brésil, a qualifié les événements de mardi de « tragédie immense » et de « désastre ». « Le parquet doit ouvrir sa propre enquête et clarifier les circonstances de chaque décès », a-t-il déclaré dans un communiqué.

L’Institut Marielle Franco, une organisation à but non-lucratif fondée par la famille de la conseillère municipale assassinée dans le but de poursuivre son combat en faveur des droits des habitants des favelas, a également critiqué l’opération. « Ce n’est pas une politique de sécurité publique. C’est une politique d’extermination qui transforme la vie quotidienne des personnes noires et pauvres en une roulette russe », a déclaré l’organisation dans un communiqué.

Source : fr.euronews.com