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Corée du Nord : premier mort du Covid-19 et forte propagation, le défilé militaire national en cause

Plus de deux ans après le début de la pandémie de Covid-19, la Corée du Nord a déclaré son premier mort de la maladie.

Propagande, ou effet cloître ? Plus de deux ans après le début de la pandémie de Covid-19 – au moins 500 millions de contaminations et 2 millions de morts dans le monde – la Corée du Nord déplore le début de l’épidémie sur son territoire et se confine. Comble de l’ironie, les chercheurs estiment que cette flambée épidémique serait liée au défilé militaire national.

La Corée du Nord a annoncé ce vendredi son premier mort du Covid-19, précisant que le virus s’est déjà répandu à travers tout le pays et que des dizaines de milliers de personnes sont actuellement « isolées et soignées ».

Ce pays reclus avait fait état ce jeudi de ses premiers cas de coronavirus, déclarant passer en mode « prévention d’urgence maximale des épidémies », après que des personnes ont été testées positives au sous-variant BA.2 d’Omicron.

L’agence de presse officielle KCNA a affirmé ce vendredi que le leader Kim Jong Un s’était rendu au siège national de la prévention des épidémies où il a « pris connaissance de la propagation du Covid-19 dans tout le pays ».

Censé être une célébration triomphale des prouesses martiales de la Corée du Nord, un défilé militaire géant pour célébrer la fondation de l’armée pourrait avoir involontairement propagé le Covid-19 dans tout le pays, selon les experts.

Un excès de confiance du dictateur ?

Pour Hong Min, chercheur à l’Institut coréen pour l’unification nationale, basé à Séoul, l’actuelle épidémie de Covid-19 est « étroitement liée à la parade du 25 avril », un gigantesque défilé militaire à l’occasion du 90e anniversaire de l’Armée populaire révolutionnaire de Corée. « Plus de 20 000 personnes se sont préparées à la parade deux mois avant l’événement et sont restées dans la capitale pour des séances de photos avec Kim Jong Un », a ajouté Hong Min à l’AFP.

Les images de l’événement diffusées par la télévision d’État montrent des milliers de personnes – non masquées et sans distanciation sociale – entassées sur la place Kim Il Sung à Pyongyang pour voir défiler les soldats et applaudir le passage de chars, de lance-roquettes et de gros missiles balistique intercontinentaux (ICBM).

« L’organisation d’un défilé militaire en présence d’une grande foule, alors que le variant Omicron faisait rage en Chine voisine, montre que Pyongyang était trop confiant dans ses capacités à combattre et à prévenir le virus », assure Cheong Seong-chang, de l’Institut Sejong.

Six personnes victimes de « fièvre » sont mortes dans le pays, dont une testée positive au sous-variant BA.2 d’Omicron, a indiqué KCNA. « Une fièvre dont la cause n’a pu être identifiée s’est propagée de manière explosive dans tout le pays à partir de la fin avril », selon KCNA.

Vers une crise sanitaire majeure

« Plus de 350 000 personnes ont présenté de la fièvre en peu de temps et au moins 162 200 d’entre elles sont complètement guéries », a détaillé la même source. « Rien que le 12 mai, quelque 18 000 personnes ont eu de la fièvre à travers tout le pays et, à l’heure actuelle, 187 800 personnes sont isolées et soignées ».

Aucun des 25 millions d’habitants n’est vacciné contre le coronavirus, Pyongyang ayant rejeté les offres de vaccination de l’Organisation mondiale de la santé, de la Chine et de la Russie, préférant miser sur la préférence nationale et des frontières fermées.

Kim Jong Un, qui est apparu pour la première fois à la télévision portant un masque, a présidé ce jeudi une réunion d’urgence du bureau politique sur la situation épidémique. Il a ordonné des mesures de confinement pour tenter d’enrayer la propagation du virus. « C’est le défi le plus important et la tâche la plus importante auxquels notre parti doit faire face pour inverser rapidement cette situation de crise sanitaire », a affirmé KCNA.

La Corée du Nord, qui a été l’une des premiers pays au monde à fermer ses frontières en janvier 2020 après l’apparition du virus dans la Chine voisine, s’est longtemps vantée de sa capacité à tenir le virus à distance. Elle n’avait jusqu’à présent signalé aucun cas confirmé de Covid-19 à l’OMS.

Le virus pourrait s’être déjà propagé à travers le pays, selon des analystes, à l’occasion notamment d’importants événements en avril à Pyongyang, en particulier un défilé militaire le 25 avril lors duquel ni les participants ni les spectateurs ne portaient de masque.

« L’organisation d’une parade militaire à laquelle a assisté une grande foule, alors que l’Omicron faisait rage en Chine voisine, montre que Pyongyang était trop confiant dans ses capacités à combattre et à prévenir le virus », a affirmé à l’AFP Cheong Seong-chang, spécialiste de la Corée du Nord à l’Institut Sejong.

Le pays pourrait faire face à une crise sanitaire majeure, Omicron étant hautement transmissible, a-t-il estimé, rappelant que Pyongyang a fait état de près de 20 000 cas en une seule journée.

Une coopération sino-coréenne

« Si le nombre de décès dus à Omicron monte en flèche, Pyongyang pourrait être amené à demander le soutien de la Chine » voisine, a-t-il ajouté. Pékin a offert ce jeudi son aide à la Corée du Nord dont les infrastructures sanitaires sont notoirement défaillantes.

La Chine, seule grande économie du monde à maintenir une politique zéro Covid, est cependant aux prises avec de multiples foyers d’Omicron en dépit de stricts confinements et de dépistages massifs à travers le pays.

M. Kim a ordonné des mesures de « confinement » et ordonné que « les personnes atteintes doivent être isolées et traitées de manière responsable », a rapporté KCNA.

Quelques heures après avoir fait état de ses premiers cas de Covid jeudi, la Corée du Nord avait tiré des missiles balistiques. L’administration du nouveau président sud-coréen Yoon Suk-yeol a fustigé ces nouveaux essais qui font partie d’une « provocation permanente de tir de missiles balistiques, malgré l’irruption du coronavirus ».