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OTAN : un sommet pour Donald Trump

Pour les Européens, le bilan du sommet de l’Alliance atlantique, le 25 juin, n’est pas glorieux. Il leur a fallu se plier aux exigences du président américain et accepter une déclaration finale très en retrait sur la Russie et la guerre en Ukraine.

« Fantastique » : euphorique après le succès de l’offensive israélo-américaine contre l’Iran, sur laquelle il a balayé tous les doutes, le président Donald Trump, triomphant, a affiché comme un exploit supplémentaire, mercredi 25 juin, le sommet de l’OTAN auquel il venait de participer à La Haye.

M. Trump a en effet de multiples raisons de se réjouir du déroulement de cette réunion, conçue dans ses moindres détails avec une priorité : ne pas irriter le président des Etats-Unis et éviter tout incident susceptible de révéler les fractures au sein du camp occidental. De ce point de vue, le sommet de La Haye – le soixante-seizième de l’Alliance atlantique – peut être jugé comme une réussite. Donald Trump l’a dominé de bout en bout, et a pu regagner Washington en brandissant son totem : l’engagement des alliés de porter à 5 % de leur produit intérieur brut (PIB) les dépenses de défense.

C’était pour lui l’essentiel. Il peut faire valoir à sa base MAGA (Make America Great Again) qu’il a arraché à ses partenaires ce que ses prédécesseurs honnis n’avaient pu obtenir : un meilleur partage du fardeau de la sécurité de l’Europe, que les Etats-Unis garantissent depuis la seconde guerre mondiale. De ce point de vue, les détails importent peu, notamment la répartition des 5 % entre nouveaux investissements et dépenses de fonctionnement, le flou sur les délais et l’absence de mécanismes de contrôle.

Pour les Européens, le bilan n’est pas glorieux. Pour apaiser ce partenaire narcissique et imprévisible, il a fallu déployer des trésors de flatterie, au point de friser le ridicule, ce qui a été le cas du secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte. Ils ont certes obtenu en contrepartie du totem de 5 % l’inscription, dans la déclaration finale, de « l’engagement sans faille en faveur de la défense collective » de tous les alliés, une façon de réaffirmer la validité de l’article 5 du traité de l’Atlantique nord. Mais que vaut cet engagement, aux yeux d’un président américain dont les déclarations– encore la veille – ne cessent de jeter le doute sur la valeur de l’article 5 ?

La concession la plus troublante des Européens à Washington porte sur la Russie et l’Ukraine. La déclaration finale, réduite à sa plus simple expression, ne mentionne ni agression russe ni guerre en Ukraine – dont on sait que Donald Trump refuse d’attribuer la responsabilité à Vladimir Poutine –, ni même une vague promesse d’intégrer un jour l’Ukraine à l’OTAN. C’est une régression notable par rapport aux sommets précédents. La Russie, qui bombarde tous les jours des cibles civiles au cœur de l’Europe et mène activement une guerre hybride contre des membres de l’OTAN, est qualifiée de simple « menace de long terme ».

Donald Trump a certes accepté de rencontrer le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, et, dans sa grande mansuétude, l’a même trouvé sympathique, mais il n’a fourni aucun engagement sur la poursuite de l’aide militaire américaine à son pays.

En dépit des apparences, les Européens sont donc seuls. A eux maintenant de relever la tête, de se préparer au désengagement concret des Etats-Unis et au retrait à venir d’une partie de leurs 100 000 soldats du continent, d’aider l’Ukraine à résister à l’agression russe, de coordonner leur industrie de la défense, de réduire la dépendance à l’égard de leur grand partenaire américain. Ces 5 % du PIB, il va falloir les trouver, non pas pour apaiser Donald Trump mais pour assurer notre propre protection.

Source : lemonde.fr