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Tragédie de Rafah : Israël affronte l’opprobre mondial

La procureure militaire promet une enquête approfondie sur les causes de l’incendie qui a tué 45 Palestiniens dans le sud de la bande de Gaza dimanche 26 mai.

Plus de 48 heures après la tragédie du camp de réfugiés de Tel Sultan, dans le sud de la bande de Gaza, l’armée israélienne poursuit son opération. Selon des témoins, ses chars sont parvenus dans le centre de la ville de Rafah. Un dernier développement, dans la droite ligne des déclarations de Benyamin Netanyahou lundi soir devant le Parlement à Jérusalem : « Je ne vais ni renoncer ni me rendre. Je ne mettrai pas fin à la guerre tant que nos objectifs ne seront pas atteints… Les combats continueront jusqu’à ce que nous hissions le drapeau de la victoire. »

Le Premier ministre répondait surtout à la pression des familles d’otages, soutenues par une grande partie de l’opinion publique, qui plaident pour que la guerre s’arrête et qu’un accord soit rapidement conclu à propos de la libération des dizaines d’Israéliens capturés le 7 octobre dernier et encore détenus.

Pour l’heure, Israël n’a toujours pas fourni d’explication officielle à ce qui est arrivé à Tel Sultan. Le Premier ministre israélien a parlé « d’accident tragique ». Et fait exceptionnel, la générale Yifat Tomer-Yerushalmi, procureure militaire, est intervenue dans les journaux télévisés pour la toute première fois depuis le début de la guerre. Elle a promis une enquête détaillée. Il s’agit de déterminer comment un tir de missiles de grande précision, et portant une charge allégée, a provoqué un tel incendie qu’il a tué, selon le ministère de la Santé de Gaza (contrôlé par le Hamas), au moins 45 personnes, dont un grand nombre de femmes et d’enfants, et fait plus de 250 blessés.

Un réservoir d’essence qui aurait pris feu

Selon la chaîne américaine ABC, qui cite une source américaine, ce serait un réservoir d’essence, situé à 100 mètres de l’immeuble ciblé, qui aurait pris feu, après avoir été atteint par un éclat de missile « ou par autre chose ». Le feu se serait propagé à plusieurs tentes et à des abris. Pour l’instant, l’armée s’en tient à sa première version. La frappe, minutieusement préparée afin de limiter les dommages collatéraux, était destinée à neutraliser deux chefs du Hamas responsables d’attentats en Cisjordanie.

En attendant, nul doute que la tragédie de Tel Sultan a porté un nouveau coup à l’image déjà très détériorée d’Israël dans le monde. Sur le plan diplomatique, le gouffre s’approfondit un peu plus chaque semaine entre Jérusalem et la communauté internationale. Vendredi dernier, c’était une nouvelle décision de la Cour internationale de justice de La Haye, qui ordonnait à Israël de cesser toutes ses opérations dans la région de Rafah susceptibles de porter encore plus atteinte à la population palestinienne. Tsahal était censé en tenir compte. Aujourd’hui, c’est la reconnaissance de la Palestine par l’Espagne, l’Irlande et la Norvège, alors que l’Union européenne envisage de prendre des sanctions contre Israël. Sans oublier, à l’heure où ces lignes sont écrites, la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU, à la demande de l’Algérie.

En Israël, les soutiens médiatiques du gouvernement Netanyahou dénoncent une hypocrisie internationale, voire un antisémitisme caractérisé. Mais d’autres commentateurs comme Nahum Barnéa, l’éditorialiste vedette du quotidien Yediot Aharonot, mettent en garde les autorités. Dans l’édition de mardi, il écrit : « Israël est susceptible de terminer l’aventure de Rafah sans options militaires, sans otages libérés, sans accord à la frontière nord et sans accord avec les Saoudiens. Un Israël boycotté et haï du monde entier. »

Source : lepoint.fr